Cocktail Molotov d’émotions (Jour 8)

La sueur au front, les cernes sous les yeux, mais le sourire aux lèvres, je cherche les mots pour vous écrire ce soir… Comme vous l’a dit Juliette hier, ici nous nous réconcilions avec nos sens. Cependant, mon sentiment ce soir c’est un trop-plein d’émotions incontrôlables, épuisantes et fascinantes. Je vais essayer de dompter tout cela, mais il se fait tard donc je ne suis pas sûre que la suite de mon article ressemble réellement à quelque chose !

L’adaptation dans ce merveilleux pays a été très facile. Mais bien que les « Karibu » répétitifs nous accueillent à bras ouverts, au bout du huitième jour de notre grande aventure, nous avons dû nous confronter à nos premiers problèmes de compréhension, d’adaptation, de culture, mais surtout de fatigue intense !

Notre journée commence à 7 heures du matin avec un petit déjeuner simple mais copieux. Nous courons pour arriver en avance à notre rendez-vous matinal : nous ne voulons pas arriver en retard pour la session de radio des Young Reporters Network. Après avoir attendu ces fameuses 30 minutes africaines, nous rencontrons enfin le responsable des YRN. Un petit homme souriant, très affectueux, parlant un anglais hésitant. Nous ne comprenons pas ce qu’il se passe, on nous trimbale, nous explique que l’émission, normalement animée par les enfants, est annulée, puis on nous offre à boire, nous nous forçons d’engloutir notre coca, puis rebelote…. on nous trimbale, nous ne comprenons toujours pas, le temps passe, on serre des mains, on nous re-explique le programme, nous ne comprenons toujours rien. Entre deux trimbalages nous discutons avec le directeur de la radio qui nous apprend qu’en Tanzanie, il y a une loi qui impose à chaque média de consacrer du temps pour les enfants, : les radios, par exemple, doivent consacrer 2 heures par semaine à un programme concernant l’enfance et la jeunesse. Nous admirons cette initiative et pendant que nous nous questionnons sur la place laissée aux enfants dans les média français, on nous re-trimbale… Bref, nous nous retrouvons dans le 4×4 de « Save The Children », direction un forum pour la journée de l’enfant africain.

Maintenant que je vous ai mis dans l’ambiance de nos 3 premières heures de la journée, imaginez-vous sortir du 4×4, entrer dans une salle remplie de Tanzaniens, où la conférence a déjà commencé. Vous vous asseyez discrètement (le discrètement est relatif ici, vous êtes un kizungu, donc par définition vous ne pouvez pas vous asseoir sans attirer les regards !), puis écoutez ce que les gens racontent…. c’est alors que vous vous rendez compte que les gens parlent en swahili, or vous ne parlez pas cette langue, mais vous êtes toujours en plein milieu de cette salle comble. Il est midi, vous avez faim, il fait chaud et vous ne comprenez pas un mot de ce qu’il se passe. Dès que le chef annonce la pause, vous allez dehors et essayez de parler avec des enfants pour les interviewer. Vous avez beaucoup de mal à les comprendre, leurs réponses ne répondent en rien à vos questions, vous êtes perdu : que se passe-t-il aujourd’hui ? Vous décidez donc de prendre votre courage à deux mains et de quitter le forum pour profiter de la fin d’après-midi. Arrivé à l’hotel, vous entendez ce fameux bruit, ce « BRRRRRRR » qui annonce un coupure de courant. Il est 14h, il n’y a plus d’électricité.

Comment vous sentez-vous ? Vous êtes fatigué ? Vous avez envie de râler, de dormir, de prendre une douche…? Eh bien non ! Après ce petit épisode, nous avons décidé de prendre les choses du bon côté, comme le font si bien les Tanzaniens. Nous avons changé d’hôtel, pris un taxi pour le Ferry, et nous sommes allées à Kigamboni (l’île la plus proche de Dar Es Salaam) pour retrouver tous les leaders de YUNA en formation.

L’air marin, la végétation luxuriante, la mer, le calme et l’isolement : voilà ce dont nous avions besoin. Juste une petite heure hors du temps et hors du monde, pour retrouver nos esprits et toute l’énergie qui va avec.

Nous avons donc retrouvé Elijah, Edward, Lawrence, Constantine… dans un endroit paradisiaque, loin de tout, où ils étaient en train de travailler sur la redéfinition de leur association (YUNA). Les sourires, les rires, les discussions enflammées, les échanges culturels ont redonné à notre journée toutes les couleurs qu’elle avait perdues.

Ce moment de trop-plein ressenti le matin avait disparu, nous étions simplement heureuses d’être là et de vivre ce moment.

En écrivant cet article, je me demande combien de séjours africains il va me falloir pour arrêter de râler en permanence et attaquer chaque journée avec un optimisme indémontable. Combien de rencontres avec les autres vont être nécessaires pour que je devienne aussi passionnante que tous ces jeunes. Mais surtout je me demande combien de temps il va falloir à cette vieille Europe pour se rendre compte qu’il y a tout un monde ici, qui grouille, qui fulmine et qui rêve de changer les choses. Il y a tant à apprendre de ces gens fabuleux, nous avons tellement à gagner à s’ouvrir aux autres, à essayer de les comprendre avant de les rejeter, à montrer de l’intérêt avant d’en avoir peur.

Je ne reviendrai pas indemne de ce séjour tanzanien. Chaque jour, je suis un peu plus convaincue de continuer à me battre pour que la voix des jeunes soit réellement entendue et prise en compte. La jeunesse est quelque chose de fabuleux, c’est l’âge de tous les possibles, elle peut faire beaucoup et elle peut faire mieux. Ces jeunes me le prouvent chaque jour : ils font des choses incroyables avec si peu.

C’est donc pleine d’énergie, de rêves et d’espoirs que je clos mon article : nous sommes la jeunesse et nous pouvons faire de grandes choses. Donnez-nous la parole, faites-nous confiance : vous ne serez pas déçu !

Hélo

3 réflexions au sujet de « Cocktail Molotov d’émotions (Jour 8) »

  1. C’est bien, Héloïse, de nous faire partager avec franchise les chocs que vous vivez. C’est rassurant, c’est ce que vous recherchiez !

  2. Très beau texte ! Je parcours un peu tous les jours votre blog, et je suis fascinée par cette initiative. Personnellement je suis une jeune française qui s’engage dans beaucoup de choses et je confirme que c’est très formateur et prometteur pour l’avenir !
    Bonne continuation, je vais revenir vers vous pour vous proposer quelque chose à votre retour ;)

  3. Magnifique article, comme le reste du blog… Quel courage, quel altruisme, une vraie leçon de vie! Bravo à vous toutes pour ce joli voyage que vous nous faites partager par la lecture et qui donne envie de s’engager à son tour.
    Aurore

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